Point de marché : Une semaine trouble !

Point hebdomadaire des marchés pour la semaine du 17 au 23 février 2025

Point de marché : Une semaine trouble !

Les marchés boursiers mondiaux traversent une période de turbulence marquée, avec des indices clés ayant enregistré des baisses significatives au cours des dernières séances. Le 21 février 2025, Wall Street a clôturé en chute libre : le Dow Jones a reculé de 1,69 %, le Nasdaq de 2,20 % et le S&P 500 de 1,70 %, reflétant les inquiétudes persistantes sur la santé de l’économie américaine et la valorisation des géants technologiques. Ces mouvements s’inscrivent dans un contexte où plusieurs analystes renommés, dont François Trahan et Robert Kiyosaki, prédisent depuis des mois l’imminence d’un krach majeur, alimentant un climat de défiance chez les investisseurs.

Conjoncture macroéconomique : un terreau fertile pour la volatilité

Ralentissement économique et pressions inflationnistes

L’économie américaine montre des signes de fragilité, avec un ralentissement de la consommation des ménages et une baisse des intentions d’investissement dans le secteur immobilier. Mathieu Savary, économiste chez BCA Research, anticipe une récession dans la zone euro dès le premier trimestre 2025, soulignant la détérioration simultanée des indicateurs aux États-Unis et en Europe. En France, le budget 2025, caractérisé par un resserrement fiscal et des coupes dans les dépenses publiques, pourrait réduire la croissance du PIB à 0,8 % et faire remonter le chômage à 8 %, selon l’OFCE.

Les craintes déflationnistes, bien qu’atténuées par une inflation à 2,4 % aux États-Unis en septembre 2024, resurgissent avec la chute des prix de l’énergie et des matières premières. Mario Draghi, président de la BCE, avait déjà alerté en 2024 sur les risques de spirale déflationniste en Europe, un scénario qui pèse aujourd’hui sur les anticipations de croissance mondiale.

Perspectives des analystes : entre prédictions apocalyptiques et nuances sectorielles

Les voix alarmistes et leurs arguments

François Trahan, stratège chez Trahan Macro Research, maintient depuis 2023 un discours catastrophiste, prévoyant une récession accompagnée d’un repli de 35 % du S&P 500. Son analyse s’appuie sur le cycle des taux d’intérêt, qu’il considère comme le principal déterminant des retournements de marché depuis un siècle. Robert Kiyosaki, auteur de Rich Dad Poor Dad, a quant à lui fixé février 2025 comme date critique pour un « crash historique », incitant les investisseurs à se tourner vers l’or, l’argent et le Bitcoin5. Bien que ce dernier ait vu sa corrélation avec les techs s’accentuer récemment5, son rôle de valeur refuge reste débattu.

David Roche, de Quantum Strategy, anticipe une correction de 20 % en 2025, liée à trois facteurs : des réductions de taux moins importantes que prévu, un ralentissement des bénéfices et l’éclatement de la bulle de l’IA. Peter Berezin (BCA Research) abonde dans ce sens, tablant sur un S&P 500 à 3 750 points (-33 %) en cas de récession américaine16.

Les contrepoints optimistes

Certains analystes tempèrent ces scénarios. Une étude de l’OFCE note que les rachats d’actions massifs et les taux directeurs en baisse pourraient soutenir les valorisations, malgré les pressions sur les marges bénéficiaires. Les performances des « Sept Merveilles » technologiques, dont les bénéfices devraient progresser de 19 % au T3 2024, illustrent cette résilience sectorielle3. Antoine Fraysse-Soulier (eToro) rappelle que le scénario d’un « atterrissage en douceur » reste plausible si l’inflation reste maîtrisée.

Dynamiques sectorielles : la tech sous pression, les cycliques en hausse

Le secteur technologique dans la tourmente

Les valorisations élevées des géants de la tech les exposent à des ajustements brutaux. ASML, équipementier clé dans les semi-conducteurs, a chuté de 20 % en deux séances après des résultats décevants, tandis que Hermès International a vu son cours osciller entre 2 687 € et 2 795 € le 22 février, reflétant une volatilité accrue sur les valeurs de croissance8. Ces mouvements confirment les craintes de David Roche sur une surévaluation des actifs liés à l’IA.

Rotation vers les valeurs cycliques et défensives

Dans un environnement de taux descendus, les investisseurs se replient sur les secteurs traditionnellement résistants aux récessions. Les services aux collectivités (+9 % au T3 2024) et l’immobilier (+7 %) surperforment, tandis que les banques bénéficient de la courbe des taux plus pentue3. Cette rotation traduit une recherche de sécurité, amplifiée par les incertitudes géopolitiques et les tensions commerciales persistantes entre les États-Unis et la Chine.

Risques géopolitiques et budgétaires : l’Europe en première ligne

L’impact du budget français de 2025

Le projet de loi de finances français, visant à réduire le déficit public à 5,3 % du PIB via des hausses d’impôts et des coupes budgétaires, pourrait coûter 0,8 point de croissance selon l’OFCE. Ce « choc d’austérité » intervient dans un contexte de défiance des marchés envers la dette souveraine européenne, alors que l’écart entre les taux français et allemands se creuse.

Incertitudes politiques et réglementaires

La dissolution de l’Assemblée nationale française en 2024 a introduit un « choc d’incertitude » estimé à -0,2 point de PIB, tandis que les élections américaines de novembre 2024 continuent de peser sur les stratégies d’investissement. Les craintes d’un durcissement réglementaire sur les cryptomonnaies et l’IA ajoutent une couche de complexité.

Conclusion : un équilibre précaire entre craintes et opportunités

La correction boursière de février 2025 s’apparente pour l’instant à un ajustement technique plutôt qu’à un effondrement systémique. Si les indicateurs macroéconomiques (emploi, consommation, production industrielle) confirment un ralentissement durable, les prévisions de krach pourraient se matérialiser. Cependant, la flexibilité des banques centrales, illustrée par la BCE prête à intervenir « sans limite », et la solidité relative des bénéfices corporate offrent des arguments aux optimistes.

Les investisseurs devraient surveiller trois signaux clés :

  1. L’évolution des données sur l’emploi américain, principal moteur de la consommation ;
  2. Les décisions de la Fed sur les taux, cruciales pour le service de la dette des entreprises ;
  3. Les résultats du T4 2024, qui valideront ou infirmeront les anticipations de croissance des bénéfices.

Dans l’immédiat, la prudence s’impose, mais les marchés pourraient offrir des opportunités d’achat dans les secteurs défensifs et les valeurs décotées une fois la volatilité apaisée.